Alors qu'elle était attendue en 2013, la fin de la prise en charge des frais de scolarité dans les écoles françaises à
l'étranger (PEC) a été annoncée dès le début juillet, valable pour la rentrée de septembre 2012 (hémisphère nord).
Quelques jours avant le second tour de l'élection présidentielle française nous avions confronté les programmes de Nicolas Sarkozy et Francois Hollande pour les Francais de l'étranger. Alors que Sarkozy souhaitait poursuivre la PEC, mesure qu'il avait instituée dès la rentrée 2007, puis dont l'extension fut stoppée en 2010 sur fond de crise, et concernant jusqu'à présent uniquement le lycée.
On notera que de toute façon cette mesure de prise en charge des frais de scolarité des frais de scolarité au lycée avait été plafonnée à hauteur des tarifs 2007/2008 en 2011, ce qui permettait d’économiser 9,4M€ au titre de l’année scolaire 2011/2012 ! Pour mémoire, un rapport parlementaire établissait les coûts engendrés par cette mesure : les montants relatifs à la seule PEC représenteraient 39,3 millions d’euros en 2010. Exemple du plafonnement : les frais du lycée français de Londres s’élèvent £4,311 pour la rentrée 2011, mais l’Etat ne prenait à sa charge que la somme de £3,246 correspondant au tarif de la rentrée 2007 (au passage vous noterez l'augmentation de 33% en 4 ans ! ).
De son coté Hollande souhaitait mettre fin à cette mesure très couteuse pour le budget de l'Etat (et qui, selon le parti socialiste, ne profitait qu’à 2% des enfants français à l’étranger) et la remplacer par un système de bourses sur critères sociaux en fonction des revenus des familles.
C'est donc fait et valable dès ce mois de rentrée 2012. On notera que le collectif budgétaire précise que la PEC n’a "concerné qu'une minorité d'élèves, soit 8.000 sur les 86.000 élèves français qui sont scolarisés dans un établissement de l'AEFE (Agence pour l'enseignement français à l'étranger), alors qu'elle mobilise 25% de la dotation de soutien aux élèves”.
Bien sur cette annonce a provoqué des remous et parents d’élèves, élus de l’opposition ou membres du Parti Socialiste. Bien dans leur rôle attendu, les nouveaux députés des circonscriptions des Français de l’étranger se sont exprimés à l'Assemblée Nationale.
Comme le rapporte Le Petit Journal, de nombreuses voix se sont élevées:
Jean-Daniel Chaoui, conseiller AFE et ancien candidat dans la 10ème circonscription avait dénoncé la méthode du gouvernement. Dans un billet publié sur son blog, il écrivait : La suppression de la PEC est faite dans la hâte, sans aucune consultation des élus socialistes députés et Sénateurs, sans aucune consultation de l’AFE (Assemblée des Français de l’Etranger). La méthode est détestable voire insupportable".
Sans surprise les 3 députés UMP élus, Claudine Schmid, Alain Marsaud et Thierry Mariani ont par ailleurs rédigé un communiqué dans lequel ils dénoncent la méthode employée pour une décision prise “sans concertation” et qui "mettra de nombreuses familles dans des difficultés financières". Les trois députés ont par ailleurs déposé un amendement contre le projet de loi de finance rectificatif pour 2012 concernant directement la suppression de la PEC et visant à annuler la décision du gouvernement.
Alors que - économie oblige - la PEC est supprimée, l'augmentation des bourses réservées aux Français de l'étranger se fait attendre. Toutefois ceux-ci peuvent toujours demander une bourse sur critère de revenus. Dans certains Lycées de l’étranger ils sont plus de 25% à la percevoir. Les bourses (montant calculés en fonction des revenus du foyer fiscal de l’enfant) sont accordées pour les élèves de la maternelle à la Terminale.
On notera que, alors que la PEC fait couler beaucoup d'encre dans les réseaux d'expatriés français, ceux ci n'ont pas jugé que cela justifiait un support massif pour Nicolas Sarkozy à la présidentielle et ont préféré se porter en plus grand nombre qu'en 2007 vers le candidat socialiste. Cette tendance s'est aussi confirmée lors des élections législatives où la gauche à remporté 8 des 11 sièges de députés.
Le député UMP Mariani (que l'on a connu moins clairevoyant) le reconnait en déclarant lors du débat sur le projet de loi de finances rectificative pour 2012 : "D’abord, bravo, car vous avez tenu parole. Pendant la campagne, vous aviez dit que vous supprimeriez la PEC. À ceux qui, à l’étranger, s’étonnent, j’ai envie de répondre qu’ils n’avaient qu’à participer au scrutin ou bien à ne pas voter pour vous."
Les députés de la majorité ont salué la fin de la PEC. Pouria Amirshahi (PS – 9ème circonscription) a dénoncé son "injustice profonde", Philip Cordery (PS - 4ème circonscription) a parlé de "vaste mascarade", Axelle Lemaire (PS - 3ème circonscription) indique également avoir pris acte de “l’engagement du Président de la République, qu’il a réitéré à Londres il y a quelques jours, selon lequel l’argent de la PEC sera réinvesti dans sa totalité dans le budget des bourses scolaires” et Pierre-Yves Le Borgn’ (EEVL - 7ème circonscription) a quant à lui estimé que la PEC était synonyme d'“élitisme social détestable dans les établissements scolaires de la République”. Au final il n'y a que la député PS Corinne Narassiguin, élue en Amérique du Nord, qui ait exprimé un bémol en regrettant que cette mesure se soit appliquée dès la rentrée 2012 tout en comprenant l'urgence budgétaire eut égard aux considérations financières de la France.
Dans un discours prononcé devant l’Assemblée des Français de l'Etranger le 03 septembre 2012, le Ministre des Affaires Étrangères a énoncé quatre engagements :
Laurent Fabius a aussi annoncé que la mise en place d'un nouveau régime des bourses se fera à l'issue d'un concertation approfondie menée par la Ministre déléguée chargée des Français à l’étranger.
En attendant, le ministre délégué du Budget, Jérôme Cahuzac, a réaffirmé lors de la discussion de juillet sur le projet de loi de finances rectificative pour 2012 que “les crédits [de la PEC] resteront sur la ligne et pourront être utilisés grâce au mécanisme de fongibilité.” “Il n’y aura donc pas d’annulation de crédits. Je pense que ce sont ces propos que vous vouliez entendre, mesdames et messieurs les députés de l’étranger” a t-il ajouté.
Au final la PEC n'aura durée que 5 ans et concerné uniquement au maximum les 3 années de Lycée. On est de retour à la case départ et il semble donc exagéré de parler d'une catastrophe pour de nombreux Français expatriés, comme on peut le lire dans la bouche de certains députés ou lire sur les forums. On peut déplorer que cette suppression ait été aussi rapide (on supprime d'abord tout de suite, on pense ensuite aux compensations mais sans se presser) mais on ne peut qu’espérer que les 11 nouveaux députés des Français de l'étranger, accompagnés des 12 sénateurs représentant les Français établis hors de France, auront à cœur de suivre très attentivement cette question et relancer le gouvernement si besoin.